Source: Office of the UN High Commissioner for Human Rights (OHCHR) |

Violences meurtrières et abus continuent en Libye; les civils durement touchés

GENEVE, Suisse, 16 novembre 2015/APO (African Press Organization)/ --

La Libye est toujours en proie à des dissensions politiques et des violences meurtrières, de multiples conflits armés touchant plusieurs régions et contribuant à une dégradation de l’ordre public, selon un nouveau rapport de l’ONU sur les droits de l’homme publié lundi.

Toutes les parties en Libye semblent commettre des violations du droit international humanitaire, dont certaines pourraient constituer des crimes de guerre, ainsi que des violations graves et des abus du droit international des droits de l’homme. Le rapport met particulièrement en exergue les abus subis par les civils vulnérables, notamment les personnes déplacées internes, les défenseurs des droits de l’homme, les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés.

Le rapport, publié conjointement par la Mission d'appui des Nations Unies en Libye (MANUL) et par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, documente des bombardements aveugles de zones civiles, des enlèvements de civils, des tortures, des exécutions et la destruction délibérée de biens, parmi les abus et violations graves du droit international commis dans diverses parties du pays entre le 1er janvier et le 31 octobre 2015.

A travers toute la Libye, les factions belligérantes se sont montrées peu soucieuses d’éviter ou de minimiser les morts et les blessures de civils et les dégâts aux objets civils, déclare le rapport. La violence a fait des centaines de morts et causé des déplacements de grande échelle ainsi que des crises humanitaires dans plusieurs régions de la Libye.

Des groupes armés rivaux ont pillé, brûlé ou détruit des maisons et des biens appartenant à des civils en représailles, semble-t-il, pour les allégeances politiques réelles ou perçues de leurs propriétaires. Ils ont continué à enlever des civils en raison de leurs liens familiaux, de leur origine ou de leur affiliation politique réelle ou présumée. Les personnes détenues sont exposées à des risques de tortures et autres mauvais traitements, pouvant parfois conduire à des morts en détention, et ce en toute impunité. Les méthodes de torture ont été documentées et comprennent des bastonnades, le maintien dans des positions douloureuses, des chocs électriques et la privation de sommeil. Les personnes enlevées se voient souvent privées de contact avec leurs familles.

Dans un contexte de dégradation de l’ordre public, d’effondrement de la loi et de luttes internes, des groupes ayant prêté allégeance au groupe dit de l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) ont pris le contrôle et consolidé leur emprise sur des portions du territoire libyen, commettant des abus graves, y compris des exécutions sommaires en public de personnes sur la base de leur religion ou de leurs allégeances politiques. Le rapport documente aussi des punitions cruelles, comme des amputations ou des flagellations commises par ces groupes.

Le rapport met aussi en lumière le sort des réfugiés, demandeurs d’asile et migrants, particulièrement ceux originaires d’Afrique sub-saharienne, qui sont de plus en plus vulnérables aux meurtres, détentions dans des conditions inhumaines, tortures, kidnappings, agressions physiques, vols armés et exploitation. Certains ont été emmenés par des groupes armés en raison, semble-t-il, des actions des gouvernements de leurs pays d’origine.

De nombreux migrants, demandeurs d’asile et réfugiés deviennent les victimes de violences brutales, de coercitions et d’abus commis par des passeurs le long d’itinéraires de contrebande, ainsi que dans des maisons dites de « connexion », où ils attendent de partir en Europe. Beaucoup font état de tortures destinées à extorquer des fonds à leurs familles, dans ce qui semble être des actions coordonnées par des gangs criminels basés dans les pays d’origine et de transit, indique le rapport. Un certain nombre de migrants et de demandeurs d’asile qui restent dans ces maisons de « connexion » ont dit avoir reçu peu de nourriture, et ce afin de faire perdre du poids aux voyageurs. Certains ont aussi déclaré que des femmes étaient parfois enlevées et abusées sexuellement.

Le rapport note aussi que des milliers d’individus sont détenus en prison ou dans d’autres centres de détention sous la supervision officielle des ministères de la justice, de la défense et de l’intérieur, ainsi que dans des locaux gérés par des groupes armés, tandis que des rapports fréquents font état de tortures et autres mauvais traitements.

Le système judicaire est toujours sérieusement entravé par le conflit en cours et l’insécurité. Le rapport indique que le système judicaire, dans les endroits où il fonctionne, ne parvient pas à garantir que justice soit rendue et les abus par les groupes armés se poursuivent dans l’impunité. Dans divers endroits du pays, les juges, procureurs et responsables de l’application de la loi sont confrontés à des menaces et des attaques, y compris des détentions et des assassinats en lien avec leur travail.

Alors que l’intolérance ne cesse de croître vis-à-vis des critiques formulées contre les personnes contrôlant de facto toute région en Libye, les défenseurs de droits de l’homme, journalistes et militants de la société civile sont pris pour cible et attaqués, enlevés ou menacés de mort. Au cours des deux dernières semaines, au moins huit professionnels des médias ont été attaqués et ont subi notamment des enlèvements, du harcèlement et des menaces. Au moins l’un d’entre eux est toujours en détention arbitraire.

Le rapport documente également le bombardement d’installations médicales, des membres du personnel médical étant pris dans les violences, victimes d’enlèvements ou détenus par divers acteurs et, selon des rapports, certains étant aussi victimes de torture et autres mauvais traitements. Le centre médical de Benghazi, le plus grand hôpital en fonctionnement à Benghazi, a ainsi été bombardé à quatre reprises entre avril et juillet.

A travers toute la Libye, le personnel médical et les autres employés des hôpitaux se sont plaints d’un climat général d’insécurité, note le rapport, des hommes armés entrant de force et prenant part à des accrochages au sein d’installations hospitalières et menaçant le personnel.  

Le rapport demande à toutes les personnes exerçant un contrôle effectif sur le terrain de prendre des mesures immédiates pour mettre un terme aux actes qui violent le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire. Les commandants doivent publiquement déclarer que de tels actes ne seront pas tolérés.

Les personnes impliquées dans des abus graves du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire sont pénalement responsables, y compris devant la Cour pénale internationale qui enquête sur la situation en Libye.

Le rapport avertit aussi que les abus et les violences continueront, à moins qu’une  solution politique basée sur le respect des droits de l’homme et de l’état de droit soit trouvée sans délai.

Distribué par APO Group pour Office of the UN High Commissioner for Human Rights (OHCHR).